LEO MARCHUTZ écrit à HANS KONRAD ROETHEL

« ….I would like to draw your attention to the article about Impressionism by Kurt Badt. In the Farbenlehre Van Goghs – where he explains so much clearer than I could that the merit of these painters is in having replaced the uniform, dark, uniting tone by the use of color in the dark parts. The curious thing is that this understanding has always been with me. You can imagine what a happy shock I got when I first read these pages of Badt 25 years later.

Did I talk about Hofmannsthal’s statement after having traveled in Greece ? It is a most remarkable essay he wrote about his experience. The climax for me is where he alludes to Rembrandt’s mystery in the dark and states that there is also a mystery in the light. Of course I cannot transcribe all he wrote.

Please remember what I said about the reversal in European painting, bringing it in a certain way closer to Oriental painting, which never was affected by the unity by darkness. There is in my paintings an elimination of shadows (which too are no problem in Oriental painting). But there is mystery in the light which was brought about by Cézanne in his watercolors and drawings. (Hofmannsthal experienced it without any knowledge or understanding of Cézanne’s achievements). This mystery is a western feeling – running through from Babylon, Egypt, Greece, Palestine to our days.”

Léo Marchutz, letter to Hans-Konrad Roethel, October 20, 1968.

En français

“...Je voudrais attirer votre attention sur l'article sur l'Impressionnisme de Kurt Badt. Dans son ouvrage “Le traité des couleurs chez Van Gogh” il explique, bien plus clairement que je ne puis le faire, le mérite de ces peintres d'avoir su remplacer les tons uniformes et sombres facteurs d'unité, par l'utilisation de la couleur dans les parties sombres. La chose curieuse est que cette conception a toujours été la mienne. Vous pouvez imaginer quel a été mon bonheur et le choc que j'ai ressenti lorsque j'ai lu pour la première fois ces pages de Badt 25 ans plus tard.
Vous ai-je jamais parlé des constatations de Hofmannsthal au retour de son voyage en Grèce ? Il a écrit un essai particulièrement remarquable sur cette expérience. Le point fort pour moi : faisant allusion au mystère de Rembrandt dans les ombres, il constate qu'il existe également un mystère de la lumière. Il m'est évidemment impossible de transcrire tout ce qu'il écrit.
Prends bien note de ce que j'ai dit sur le renversement dans la peinture européenne, se rapprochant d'une certaine manière de la peinture orientale, laquelle n'a jamais été concernée par “l'unité par les ombres”. Ma peinture procède à une élimination des ombres (ce qui par ailleurs ne constitue pas un problème dans la peinture orientale). Mais il existe un mystère de la lumière traité par Cézanne dans ses aquarelles et dessins. (Hofmannsthal en a fait l'expérience sans connaissance ni compréhension des avancées de Cézanne). Ce mystère est un sentiment occidental, qui, depuis Babylone, l'Egypte, la Grèce et la Palestine, se perpétue jusqu'à nos jours.

Lettre de Léo Marchutz à Hans-Konrad Roethel en date du 20 octobre 1968.

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